Réponse de Philippe Briand, Président de Tours Métropole Val de Loire à Loïc Vaillant, président du CODEV de Tours Métropole
La compréhension de l’avis par TMVL
Vous avez souhaité vous autosaisir de la question de l’avenir de l’aéroport de Tours, à l’occasion du départ de l’Ecole de Chasse de la BA 705. Cette décision de l’Etat pour notre aéroport régional est un mal pour un bien. Elle nous donne l’occasion de définir un nouveau projet aéroportuaire. Il revient donc à la Métropole, aidée par son Conseil de développement d’imaginer la poursuite des activités civiles sans le soutien logistique de l’armée de l’air.
Assisté d’une mission de Polytech Tours, votre instance a réalisé un diagnostic du Nord de Tours et de l’impact de l’aéroport sur la vie de la Métropole, et plus particulièrement le quartier élargi de l’aéroport, en mettant en évidence l’interdépendance entre le devenir du quartier et le devenir de l’aéroport.
Vous avez choisi de conduire l’analyse de 3 scénarii d’évolution de l’aéroport (croissance/Diversification/reconversion). Cet exercice de prospective, dans la transparence, est puissant, dès lors que vous n’avez écarté aucune hypothèse.
Que le Codev ait très vite choisi le scenario de la diversification de l’aéroport me conforte dans le choix qui est le nôtre, à Tours Métropole comme au Syndicat Mixte pour l’Aménagement et le Développement de l’Aéroport de Tours Val de Loire.
Le scenario de diversification passe donc par l’ouverture de nouvelles lignes commerciales ainsi qu’au moins un doublement du nombre de passagers. Actuellement sous la barre des 200.000 voyageurs, l’aéroport de Tours se donne comme objectif d’attendre 350.000 passagers en 2025 et 500.000 à l’horizon 2050. Cette évolution est impérative. L’aéroport de Tours doit en effet affirmer sa place sur la carte des grands aéroports régionaux. Cette évolution passe par le choix de la diversification des offres de lignes mais également des offres d’activité autour des pistes, à la faveur des espaces libérés par l’armée de l’air, mais plus globalement au-delà.
Ce choix de la diversification que vous préconisez et que nous partageons est motivé en ce qui vous concerne par le risque que vous pointez, dans l’hypothèse d’un scenario de croissance, de voir l’aéroport de Tours devenir l’aéroport de Paris Sud, mais également par le souhait de voir l’aéroport plus ouvert sur son hinterland et qui développerait son aire d’influence (foreland).
L’avis du Codev proposait ensuite des préconisations pour réaménager la ville-aéroport et la rendre attractive. Vous avez ainsi recommandé :
- De recoudre et redonner de l’attractivité au Nord de Tours par des projets urbains et de renouvellement urbain,
- De connecter l’aéroport de Tours à la ville et à la région,
- De maîtriser le foncier.
2 études urbaines sont actuellement en cours et prennent en compte l’ensemble du fonctionnement global du secteur. Mais d’ores et déjà et à ce stade, voilà ce que je peux vous répondre :
Pour ce qui concerne l’avenir de l’aéroport, et sa stratégie de diversification comme équipement aéroportuaire
Les travaux réalisés par le SMADAIT depuis l’annonce du transfert des installations aéronautiques militaires (été 2021) révèlent un potentiel exceptionnel pour le site et plus largement pour la région Centre. Plus de 30 000 m² de hangars et d’ateliers, 14 Ha de parkings aéronautiques et de larges espaces à valoriser seront disponibles.
S’agissant des transports de voyageurs, la DGAC a annoncé officiellement l’installation de la première tour de contrôle digitale en France, à base de caméras haute définition, de réalité augmentée et d’intelligence artificielle. Cette innovation permet d’envisager un plan de développement de lignes aériennes raisonnables, à vocation d’import touristique ciblée sur les pays européens voisins.
L’aéroport de Tours prépare ainsi avec ses partenaires un aéroport régional à échelle humaine, porte d’entrée du Val de Loire, accueillant les toutes dernières technologies aéroportuaires mais aussi de la mobilité terrestre et aérienne et des loisirs. Le projet intègre ainsi en amont tous les enjeux environnementaux (biodiversité, réduction d’émissions de GES, mutualisation des moyens, mobilités innovantes) tout en promettant de nombreuses création d’emplois et un nouveau quartier attractif ouvert à tous pour les affaires comme pour les loisirs.
Le projet de quartier de l’aéroport, centre du point névralgique de l’activité économique en Touraine
Le projet de développement vers une diversification des offres de l’aéroport ne se dissocie pas du projet de quartier de l’aéroport, que nous concevons comme un aéroport nouvelle génération. Sa localisation et les surfaces à libérer par l’Armée de l’Air nous en donnent les moyens.
En effet, le nord de la Métropole de Tours est un point névralgique de l’activité économique en Touraine, avec une forte concentration de parcs d’activités qui hébergent de nombreuses entreprises. Ainsi, dans un rayon de 5 km autour de l’aéroport plus de 1100 établissements emploient près de 20 000 salariés, répartis sur une vingtaine de parcs d’activités représentant une superficie cumulée de 600 ha sur un total de 1740 ha pour l’ensemble de la Métropole, soit plus d’un tiers du total.
Comme dans une grande partie de la Touraine, et de façon exacerbée sur la Métropole, les espaces disponibles pour l’installation de nouvelles activités ou l’extension des entreprises déjà implantées devient une denrée extrêmement rare, le taux d’occupation des espaces alloués à l’activité économique approchant actuellement les 95%.
Le départ de l’école de chasse en juillet 2021 ouvre une perspective de développement sur le site de l’aéroport et une bouffée d’air frais pour l’accueil de nouvelles activités au sein même de l’empreinte urbaine. Dès cette échéance, ce sont 30.000 m² de locaux qui pourraient être investis par des entreprises, porteurs de projets et investisseurs sur cet espace de 300 ha qui sera restitué à l’activité civile.
Il faudra bien entendu compter sur le renforcement du trafic commercial, avec le développement du nombre de voyageurs entrant sur le territoire par la diversification des destinations desservies et des compagnies présentes sur l’aéroport, ainsi que sur le renforcement de l’aviation d’affaires, actuellement en pleine croissance. Mais en local, le site est d’ores et déjà engagé dans de nombreux programmes innovants qui permettront de renforcer encore l’attractivité économique de la Métropole:
• Première Tour digitale en France (IA, Réalité augmentée, contrôle déporté)
• Zone de test pour drones et circulation aérienne intégrée (UTM)
• Surveillance des infrastructures et des clôtures par drones autonomes
• Développement de drones à pile à combustion (H²)
• Multimodalité et expérience passagers : parking rénové, navettes autonomes, auto-check in, moyen de paiement dématérialisé et sécurisé, chatbot dédié. Autant de nouvelles technologies pour améliorer la qualité de l’accueil, l’offre d’informations et la fluidité de la circulation des passagers
• Formation aux métiers de l’aéronautique, dont Airline Pilot Academy est précurseur, et qui nécessitera la création d’un pôle dédié à la maintenance aéronautique.
A plus long terme, le projet de développement prévoit centre d’affaires, centre de séminaires, hôtels, tiers-lieu, entrepôt sous douane, espace de loisirs, restaurants, salles de sport. A cette fin, outre l’aménagement des espaces libérés par l’école de chasse et le prolongement des parcs d’activités au nord de la piste (30 ha sur Parçay-Meslay), un parc immobilier tertiaire verra le jour sur une dizaine d’hectares de terrains à acquérir au sud du site, pouvant développer jusqu’à 30 000 m² de surface dédiée à l’activité.
Par ailleurs, vous suggérez de
confier à l’établissement public foncier (EPF) récemment créé la maîtrise
foncière de cette zone pour permettre une plus grande réactivité face à des
hypothèses intéressantes. Or, comme vous le soulignez, le PLU de Tours a prévu une zone d’attente de
projet sur le secteur de l’aéroport, ce qui permet de nous assurer de mener à
bien le projet ambitieux que je vous ai décrit.
Il est par ailleurs trop tôt pour se prononcer sur le rôle que pourrait jouer l’EPF dans ce projet, son plan pluriannuel d’interventions étant en cours de définition. Nous devrions pouvoir connaître ses marges de manœuvre en 2020.
L’aéroport, au cœur des enjeux de mobilité du territoire
Comme vous l’avez bien identifié, la situation de l’aéroport est très favorable : il est déjà très connecté grâce au carrefour autoroutier A10, A71, A28, A85, qui le place favorablement pour être rejoint par les voyageurs locaux mais également par les voyageurs arrivant des territoires voisins voulant profiter de notre infrastructure. Cette situation est bien sûr aussi intéressante pour les usagers arrivant par l’aéroport de Tours. Le ratio arrivants/sortants est aujourd’hui de 30/70. Nous visons demain (2025) un objectif de 50/50.
Pourtant, vous pointez à juste titre que la desserte de l’aéroport pourrait être améliorée.
Il nous faut en effet améliorer la liaison entre les points d’arrivée à Tours et son aéroport. Vous aviez signifié dans un précédent avis relatif au tracé de la ligne 2 du tram (avis sur saisine de TMVL le 1er juin 2018) qu’il était impératif de desservir l’aéroport par le tram et étendre ainsi la ligne 1 de Vaucanson jusqu’à l’aérogare.
Je suis heureux de vous informer que le conseil métropolitain, par délibération en date du 17 décembre 2018 a arrêté les grandes lignes du projet de réseau et ses variantes et prévoit expressément le prolongement de la ligne A de tramway à son extrémité Nord, afin de desservir le site de l’aéroport, des grands équipements et des espaces en reconversion en 2025. D’ores et déjà, et depuis quelques années, le quartier de Tours Nord est quant à lui desservi par la ligne A du tram et la ligne 2 tempo qui sont les lignes les plus fortes du réseau Fil bleu.
Nous travaillons également à l’hypothèse de création d’un pôle mobilités permettant d’accueillir des cars touristiques, mais également un hub vélo, une aire de covoiturage.
Ce sujet est à mener avec les partenaires que sont notamment la ville de Tours, Cofiroute et la Région pour travailler sur les lignes Rémi qui pourraient s’arrêter sur ce secteur, sachant que cela entraine une rupture de charge vers Tours.
Vous pointez du doigt une supposée faible fréquentation du Parc relais Vaucanson. Celui-ci accueille en moyenne journalière de semaine 217 véhicules pour 281 places ce qui présente un taux de remplissage de 76%.
Enfin, vous aviez fait observer dans votre avis en date du 1er juin 2018 précité que l’accès piéton pour rejoindre l’aérogare était de médiocre qualité.
Une réflexion globale de création de liaison entre le parc relais et l’entrée de l’aéroport est en cours, dans la continuité des travaux d’amélioration du parking de l’aéroport. Il s’agit notamment de rendre plus lisible le cheminement vers l’équipement et le sécuriser pour des piétons équipés de valises. L’aménagement devra intégrer un traitement paysager fonctionnel en lien avec celui de l’aéroport. Ces aménagements et la fin de la gratuité du parking, peuvent engendrer une plus grande utilisation des transports en commun pour accéder à l’équipement et ainsi contribuer à la limitation des nuisances sonores et pollution lié à un trafic routier croissant.
Sur ce dernier point, et en lien avec votre recommandation de recoudre et redonner de l’attractivité au Nord de Tours, par des projets urbains et de renouvellement urbain, je partage votre analyse sur l’intérêt de travailler à une meilleure interconnexion avec les Hauts de Sainte Radegonde, de l’éco quartier de Monconseil et du quartier de l’Europe. Ces questions relèvent pour l’heure du PLU de Tours mais dans le cas où un PLUI serait à l’étude, il reprendra cette même orientation.
Il convient en outre de ne pas mésestimer l’impact de l’activité du quartier de l’aéroport sur les autres communes riveraines de l’aéroport. J’ai bien noté qu’elles vous avaient fait savoir au cours de vos travaux que la question et du périphérique et du péage autoroutier les préoccupait.
Cofiroute, à qui la Métropole a demandé il y a deux ans les conditions pour rendre gratuite la portion urbaine de l’A10, a bien entendu fait savoir que cette gratuité devrait être compensée par la Métropole.
S’agissant du bouclage du périphérique pour fluidifier la circulation dans le Nord de Tours, il a été étudié par le Département il y a quelques années l’option d’un raccordement à l’A28, imposant la création d’un échangeur et la gratuité jusqu’à Tours. Cela impliquait le rachat du péage de Tours nord et le rachat des amortissements restants sur la section gratuite au titre des contrats de concession sur l’A28 et sur l’A10. La facture s’élevait à 150 M€, uniquement pour les pertes au titre des contrats (c’est-à-dire hors travaux). D’autres études ont été menées pour améliorer la fluidité du trafic sur le réseau routier nord. Elles ont abouti à un certain nombre de propositions d’aménagement de voiries existantes et de création de liaisons permettant le désengorgement du secteur nord. Sur cette base, des travaux aux points d’intersection du barreau nord ont été entrepris et seront complétés dans les années à venir
Enfin, Le CODEV préconise de lancer en 2019 un grand CONCOURS international d’urbanisme et de définir le CAHIER DES CHARGES dans une optique de la neutralité carbone.
Je partage votre ambition. Il faut bien ici distinguer les études menées par le SMADAIT pour l’optimisation des 200 hectares libérés qui sont distinctes du dialogue compétitif piloté par TMVL, sur le périmètre élargi. Vous préconisiez que l’impact environnemental de l’aéroport soit pris en compte et orienté dans le sens d’une neutralité carbone. Je vous confirme que cela sera le cas.
Quoiqu’il en soit, s’agissant des deux démarches complémentaires, et plus généralement de l’évolution de ce grand projet, je préconise que le CODEV puisse être associé à la réflexion selon des modalités à définir.